Le hand, bel exemple de féminisation du sport en Seine-Saint-Denis

Le hand, bel exemple de féminisation du sport en Seine-Saint-Denis
Handball
  • Samedi 11 novembre, une belle fête du hand made in 93 s’est tenue au palais des Sports de Tremblay : les filles de Noisy-le-Grand l’ont emporté 24-23 contre Toulouse, et les garçons de Tremblay ont déroulé 36-27 contre Caen.
  • L’occasion de faire un focus sur cette discipline où l’égalité filles-garçons n’est pas un vain mot.
  • Si les salaires et la médiatisation sont encore à la traîne chez les femmes, les clubs et les instances dirigeantes mettent de plus en plus de moyens pour développer le hand féminin, voire lui accordent la priorité, à l’image de Noisy-le-Grand.

Ce samedi soir, Isolina, 10 ans, est fière. Avant le match opposant les « grandes » de son club, le Noisy-le-Grand handball à Toulouse, elle a pu accompagner Eva Mbata, joueuse originaire de Bondy sur le terrain pour la présentation des équipes. Et elle a remporté avec son club le mini-challenge organisé par le Comité 93 à la mi-temps. L’occasion, pour celle qui pratique le hand depuis 2 ans, de montrer que les filles aussi savent se défendre dans cette discipline.

« Quand c’est possible de ne faire des matches qu’entre filles, je préfère, témoigne cette jeune fille, qui jouera encore en équipe mixte jusqu’à ses 13 ans. Car certains garçons sont embêtants, ils ne te font pas la passe, juste parce que tu es une fille. Alors peut-être que le fait de voir qu’il y a aussi du sport de haut niveau chez les filles, ça peut les faire changer d’avis. », espère-t-elle aux côtés de sa maman.

Samedi 11 novembre, c’était en effet la fête du hand au Palais des Sports : pour la deuxième fois de leur histoire – la 1ère édition avait eu lieu l’année dernière – Tremblay, l’hôte des lieux, et Noisy-le-Grand avaient mis leur forces en commun pour organiser deux matches de haut niveau, l’un masculin, l’autre féminin. Ces deux clubs phares du 93 évoluent en effet tous deux en D2, avec des budgets certes sans commune mesure mais une même ambition : valoriser tout le potentiel d’un territoire comme la Seine-Saint-Denis.

Une double confrontation qui était saluée notamment par Béatrice Barbusse, vice-présidente de la Fédération et grande défenseuse de l’égalité femmes-hommes à travers le sport : « Des doubles matches comme ça, c’est parfait. D’abord parce que ça permet aux hommes de voir qu’il y a des femmes qui évoluent à haut niveau, même si je pense qu’ils le savent car on est quand moins machistes que d’autres sports. Et puis, cela permet aussi aux jeunes spectatrices de se projeter sur des modèles féminins, de s’identifier, de voir que c’est possible », expliquait celle qui est aussi sociologue du sport.

La preuve vivante de son constat avait les traits d’Aaliyah, 12 ans. Cette jeune pivot du Tremblay handball avait bien apprécié le match des Louves de Noisy avant de donner de la voix sur celui des garçons. « C’est le premier match de D2 féminine que je vois en vrai. Chez nous à Tremblay, il n’y plus d’équipe féminine à partir des U13 donc on n’a pas tellement l’occasion de voir du handball féminin de haut niveau. J’ai bien aimé, notamment la demi-centre Meïssa Maurice », analysait la jeune fille dont le modèle s’appelait jusqu’ici Léo Naal, pivot de Tremblay.

Une tendance d’inscriptions à la hausse chez les filles

Premier sport scolaire en France, le handball part certes de beaucoup moins loin que d’autres sports, mais nombreux sont les acteurs au sein du département à travailler à féminiser encore davantage la pratique et surtout parvenir à une égalité de conditions. Des efforts qui portent leurs fruits puisqu’au cours des 4 dernières années, la part des filles pratiquant le hand en clubs est passée de 32 à 37 % (aujourd’hui le ratio est environ de 2000 licences filles pour 3400 garçons).

« On a dans le 93 tout un réseau de clubs qui travaillent très bien ensemble et constituent une sorte de chaîne dans la formation des joueuses. Une joueuse comme Eva Mbata, originaire de Bondy, a été formée à Aulnay et poursuit aujourd’hui à haut niveau chez nous en D2. Au total, il y a 4 joueuses dans notre équipe première cette année qui sont originaires de Seine-Saint-Denis », détaillait ainsi Jean-Christophe Naal, président du Noisy-le-Grand. Un réseau de clubs évidemment activement soutenus par le Département, représenté samedi soir par la conseillère déléguée aux sports Zaïnaba Saïd Anzum.

Des sportives du département impliquées

Parfois, ce sont même directement les joueuses qui s’impliquent, à l’image d’Amina Tounkara, une des gardiennes des Louves. Consciente, pour l’avoir vécu, des nombreux freins qu’il peut encore y avoir pour une jeune femme issue des quartiers populaires à choisir le sport de son choix, elle a créé en 2020 l’association Hand’Joy qui vise justement à donner aux jeunes filles des exemples de réussite proches d’elles. « La base de notre travail est toujours la même, elle tourne autour de la confiance en soi, dans son corps et dans ses chances. Mais on décline ce travail selon des formes différentes », ponctuait la jeune femme de 25 ans qui vient de lancer en compagnie de la championne olympique Grâce Zaadi, qui a grandi à Villepinte, le programme Championnes. Soit un accompagnement de 14 jeunes filles du département les invitant à voir dans le sport un moyen de socialisation et d’émancipation. Invitées à la Maison du Handball à Créteil lors des vacances de la Toussaint, ces jeunes filles ont notamment commencé à travailler sur une BD en compagnie de graphistes où elles raconteront chacun une (leur ?) histoire d’insertion par le sport.

En marge de toutes ces explications, l’aspect sportif était aussi au rendez-vous puisque Noisy l’aura emporté sur le fil 24-23 contre Toulouse après s’être rendu le match bien compliqué et que Tremblay aura géré les affaires courantes 36-27 contre Caen. Ah oui, on oubliait : en challenge du Comité 93, les filles auront aussi battu les garçons dans le mini-challenge qui les opposait. Championnes !

Christophe Lehousse

Photos: ©Sylvain Hitau

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